Règles juridiques pour la vente en ligne et directive Omnibus
16.06.22Vous dirigez une entreprise et vous vendez en ligne vos produits ? C’est le moment de vous mettre à jour !
En effet, une nouvelle règlementation relative au renforcement de la protection des consommateurs entre en vigueur le 28 mai 2022. Il s’agit, plus précisément, de l’ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021, qui transpose la directive européenne 2019/2161 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019, dite directive OMNIBUS
Son objectif ? S’adapter à l’évolution du commerce en ligne et protéger davantage les consommateurs en quête d’achat, face à l’augmentation croissante des abus commis par certains vendeurs.
Pour répondre à cet enjeu, de nouvelles règles protectrices ont fait leur apparition. Leur objet ? Alourdir les sanctions infligées aux vendeurs pour réprimer les infractions qu’ils ont commises. Ainsi, ce nouveau corps de règle touche de nombreux domaines : les pratiques commerciales trompeuses et déloyales, en passant par le devoir d’information au profit des consommateurs, ainsi que la protection de leurs données personnelles, etc…
Face à ces nouvelles armes légales de dissuasion, vous devrez vous assurer d’être en conformité. A défaut, vous vous exposez à de fortes sanctions. Voici donc un exposé de quelques règles à suivre parmi celles prévues par la loi de transposition.
Les pratiques commerciales trompeuses et déloyales
Certains comportements adoptés par les vendeurs, auparavant considérés comme licites sont constitutifs de pratiques commerciales trompeuses selon la nouvelle réglementation
Concrètement, desquels s’agit-il ? Voici quelques exemples des nouvelles règles.
Promotions en ligne
Vous souhaitez appliquer une promotion en réduisant le prix de vente de l’un de vos produits ? Désormais, indiquer le prix antérieur du produit ne suffira plus ! Il faudra afficher le prix le plus bas ayant été pratiqué au cours des trente derniers jours précédents la promotion. L’affichage de ce « prix de référence » vous permettra ainsi de justifier que l’offre promotionnelle est bel et bien licite, afin d’échapper aux sanctions éventuelles prévues en cas d’illicéité.
Toutefois, certains produits (comme les denrées périssables) et certaines opérations ne sont pas concernés par cette règle.
Vente d’un produit identique d’une même marque dans plusieurs pays membres de l’UE
Si vous vendez un produit identique d’une même marque dans plusieurs pays de l’Union européenne, mais que sa composition ou que ses caractéristiques diffèrent d’un Etat à un autre, bien qu’il s’agisse du même produit alors ceci sera bientôt considéré comme une pratique commerciale trompeuse à partir du 28 mai 2022. En effet, cette nouvelle règle a pour vocation de lutter contre la différence de qualité entre les produits identiques d’une même marque qui sont vendus dans plusieurs Etats membres de l’Union Européenne.
Vente d’un produit et avis certifié des consommateurs
D’une part, lorsque vous mettrez en vente un produit sur Internet, il faudra bien veiller à indiquer si le vendeur est un professionnel ou un particulier.
D’autre part, les avis sur les produits qui sont postés par les consommateurs devront certifier que ces derniers ont effectivement bel et bien acheté ou utilisé le bien dont ils parlent. Cette nouvelle disposition a pour objet de lutter contre les faux avis en ligne.
Enfin, pour que les consommateurs soient mieux orientés durant leurs achats, les produits vendus en ligne devront être classés selon des paramètres transparents et accessibles.
Sanctions pour pratiques commerciales trompeuses et déloyales
L’étendue des sanctions pénales et civiles qui sont prévues en matière de pratique commerciale trompeuse est considérable. Si vous êtes reconnu coupable d’un tel comportement, vous pourriez être passible de deux ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. Celle-ci peut même être élargie à 10% de votre chiffre d’affaires moyen, ou bien, à 50% des dépenses engagées pour la production de la publicité litigieuse.
Il en va de même en ce qui concerne les pratiques commerciales considérées comme déloyales. Si vous y avez recours, vous encourrez une amende civile d’un montant de 300 000 euros, déloyal qui pourrait même être élargie à 4% de votre chiffre d’affaires, voire à 2 000 000 d’euros. Par ailleurs, des dommages et intérêts peuvent également être dus.
Devoir renforcé d’information précontractuel du consommateur
Le risque encouru est similaire lorsqu’il s’agit de prodiguer les informations nécessaires aux consommateurs avant la conclusion du contrat. Concrètement, l’amende prévue à cet effet qui s’élève actuellement à un montant de 3000 euros pour les personnes physiques, et de 15 000 euros pour les personnes morales, sera respectivement élargie à 15 000 euros (personnes physiques) et 75 000 euros (personnes morales).
Elle pourra être infligée au professionnel qui n’informe pas le consommateur, avant la conclusion du contrat, sur la façon dont ce dernier peut faire jouer les garanties afférentes au produit (comprenant la garantie légale de conformité et celle des vices cachés). Le professionnel aura également pour obligation de fournir les informations nécessaires relatives aux conditions de la vente qui seraient utiles à savoir pour le consommateur. Il devra également informer celui-ci à propos du moyen par lequel, le consommateur peut faire appel au service après-vente.
Par ailleurs, lorsque les consommateurs se verront proposer un prix personnalisé pour l’achat d’un produit en ligne, le professionnel devra également les informer clairement sur l’algorithme à l’origine de ce prix.
Ainsi, cet agrandissement du devoir d’information aux consommateurs a vocation à mieux les protéger, afin qu’ils puissent réaliser un achat en ligne de façon éclairée.
Clauses abusives et sanctions alourdies
Dans un contrat de consommation, l’insertion de clauses contractuelles favorables au professionnel et défavorables pour le consommateur s’avère tentant.
Selon certains cas définis par l’article L. 212-1 du Code de la consommation, ce genre de clauses est parfois considéré comme étant abusif par les juges sur demande par exemple du consommateur ou de la DGCCRF. Si vous êtes à l’origine d’une clause abusive en tant que professionnel dans un contrat de consommation, , gare aux sanctions : elles sont désormais alourdies
En effet, comme en matière de devoir d’information, l’amende civile est augmentée de 3000 euros à 15 000 euros pour les personnes physiques, et de 15 000 euros à 75 000 euros pour les personnes morales. De plus, si l’infraction relevée s’avère être « de grande ampleur », alors cette amende pourrait être portée à 4% de votre chiffre d’affaires, ou bien, à 2 000 000 d’euros.
En cas de sanction administrative, les montants prononcés seront identiques à ceux de l’amende civile si une clause du contrat est considérée comme abusive.
Le caractère dissuasif de ces nouvelles sanctions devrait ainsi permettre de lutter contre les abus.
Information dans le contrat de fourniture numérique
Désormais, l’ensemble des règles relatives aux contrats conclus à distance et hors établissement s’appliqueront également aux contrats de fourniture numérique, qui sont notamment relatifs à l’installation d’une application mobile ou de services numériques (comme par exemple, la souscription à un logiciel de traitement de texte).
Parmi ces nouvelles règles, l’une concerne la phase précontractuelle. Dans le cadre d’un contrat de fourniture numérique, le professionnel aura ainsi l’obligation de fournir au consommateur, avant la conclusion du contrat, l’ensemble des informations issues du fournisseur du contenu numérique ou du service numérique sur lequel porte le contrat.
En l’absence de ces informations, le professionnel risque gros. Comme pour les autres sanctions vues précédemment, une amende civile de 15 000 euros pour les personnes physiques, et de 75 000 euros pour les personnes morales pourra être infligée. De plus, si l’infraction relevée est considérée être « de grande ampleur », alors cette amende pourrait être portée à 4% du chiffre d’affaires.
Interdiction des visites au domicile du consommateur
Une autre nouveauté phare de l’ordonnance du 22 décembre 2021 est relative aux visites à domicile. En effet, il faudra désormais vous abstenir de vous rendre au domicile de votre client en tant que consommateur, si celui-ci a indiqué ne pas vouloir une telle visite.
Autrement, la sanction sera salée : le professionnel qui se rend sans autorisation au domicile de son consommateur encourt un an d’emprisonnement, ainsi que 150 000 euros d’amende. Il sera alors reconnu coupable de violation de domicile.
Il existe également d’autres règles instituées par la loi de transposition n° 2021-1734 dont il vous faudra tenir compte. Ainsi, si votre secteur d’activité est concerné par ces nouvelles dispositions, il est urgent de se mettre en conformité.
Françoise Berton, avocat en droit allemand
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