Arrêts de la Cour de Cassation sur le régime de l’agence commerciale
20.12.13La Chambre Commerciale de la Cour de cassation a, dans deux arrêts en date du 8 octobre 2013, précisé le régime de l’agence commerciale en droit français, et notamment en ce qui concerne les modalités de calcul de l’indemnité de cessation de contrat et l’application de la clause de non-concurrence.
Première décision sur l’indemnité au profit de l’agent commercial en droit français
Dans son premier arrêt, la Chambre commerciale a rappelé le principe selon lequel l’indemnité de cessation de contrat est une indemnité réparatrice qui doit indemniser l’ensemble du préjudice subi par l’agent commercial français du fait de la rupture du contrat.
En l’espèce, une Cour d’appel française a évalué une indemnité de cessation de contrat en considération du montant des commissions perçues par l’agent pendant les deux dernières années d’exécution du contrat.
La Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel sur le mode de calcul de l’indemnité et a rappelé que cette indemnité a un caractère réparateur et doit indemniser l’ensemble du préjudice subi par l’agent commercial du fait de la cessation du contrat. Selon la Haute juridiction, ce préjudice comprend d’une part la perte de toutes les rémunérations acquises lors de l’activité développée dans l’intérêt commun des parties, sans qu’il y ait lieu de distinguer selon leur nature et d’autre part, la partie fixe mensuelle que l’agent commercial percevait.
Les modalités de calcul de l’indemnité de cessation d’une agence commerciale ne sont pas expressément déterminées par l’article L. 134-12 du Code de commerce français, mais résultent de la jurisprudence de la Cour de cassation.
Dans cet arrêt, la Cour de cassation précise à ce propos que l’indemnité doit prendre en compte non seulement les commissions versées à l’agent, mais également la partie fixe de sa rémunération.
Seconde décision sur la clause de non-concurrence dans le contrat d’agence commerciale
Dans le deuxième arrêt rendu le même jour, la Chambre commerciale de la Cour de cassation s’est également prononcée sur l’étendue territoriale d’une clause de non-concurrence en droit français stipulée dans un contrat d’agence commerciale au profit de la société mandante.
Cette clause prévoyait l’interdiction pour l’agent commercial en France de représenter des produits concurrents, sauf autorisation expresse de la société mandante, sans préciser l’étendue territoriale de cette interdiction.
La société mandante, qui a constaté que son agent commercial intervenait pour une entreprise concurrente, qui était implantée en dehors du secteur de prospection tel que défini dans le contrat d’agence commerciale, a résilié ce contrat pour faute grave de l’agent commercial en estimant que celui-ci a porté atteinte à son engagement de non-concurrence.
L’agent commercial l’a alors assigné pour lui voir imputer la rupture du contrat et obtenir une indemnité de cessation de contrat.
La Cour d’appel a fait droit à cette demande, en estimant que l’obligation de non-concurrence, qui est le corollaire de l’obligation de loyauté, n’est exigée de l’agent commercial, à défaut de définition d’un secteur différent prévu par les parties, que pour le territoire sur lequel doit être exécuté le mandat.
La Cour de cassation n’a pas suivi cette argumentation : selon la Haute juridiction, l’agent commercial était tenu en droit français de l’agence commerciale d’un devoir général de loyauté envers sa mandante qui lui interdisait de représenter une entreprise concurrente sans son autorisation. Selon la Cour, cette obligation était également imposée par le contrat qui, en ce qu’il ne précisait pas l’étendue de l’engagement de non-concurrence, ne la restreignait pas au seul territoire dans lequel l’agent commercial bénéficiait d’une exclusivité pour représenter les produits de la société mandante.
Cette décision s’inscrit dans la jurisprudence constante de la Cour de cassation, selon laquelle l’agent commercial, qui souhaite représenter une entreprise concurrente, doit en informer son mandant et obtenir son autorisation. Un manquement à cette obligation de loyauté constitue une faute grave qui a pour conséquence de priver l’agent commercial de l’indemnité compensatrice du préjudice que lui cause la résiliation du contrat.
Françoise Berton, avocat en droit allemand
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