Droit au renouvellement automatique de son mandat social pour le président de SAS?
05.01.22La SAS est la forme sociale qui confère aujourd’hui le plus de liberté à ses associés. En effet, les statuts déterminent l’organisation et le fonctionnement de l’entreprise, lorsque seulement quelques textes légaux viennent l’encadrer. Ainsi, si la nomination d’un président de SAS est imposée par la loi, les statuts sont souverains pour définir les modalités de désignation de celui-ci, la durée déterminée ou indéterminée de son mandat etc… Le rôle de la jurisprudence est par conséquent primordial lorsque les statuts sont ambigus ou doivent être interprétés. En effet, en dernier recours, ce sont les juges qui tranchent au cas par cas les difficultés liées aux règles de fonctionnement de la SAS. C’est ainsi que la Cour de cassation a pour la première fois dans un arrêt de sa chambre commerciale du 17 mai 2021 (n°19-14 525), éclairci la question de la tacite reconduction du mandat d’une présidente de SAS. Excluant clairement cette possibilité, elle inscrit corrélativement entre la révocation, la démission et l’incapacité, l’arrivée du terme du mandat social de président de SAS comme mode de cessation de plein droit du mandat de président.
Durée fixe de mandat de présidente de SAS
En l’espèce, l’assemblée générale d’une SAS aboutit le 26 juin 2012 à la désignation d’une présidente mandatée pour une durée de trois ans. Les statuts de la société précisent que la présidente ne pourra être révoquée durant son mandat que pour motif grave par décision collective unanime des associés. Dans le cas d’une révocation injustifiée, une indemnisation pourrait alors être demandée par cette dernière. Trois ans s’écoulent et le mandat social de la présidente expire. Une nouvelle assemblée générale se tient le 23 juin 2015. Cependant, la question d’un potentiel renouvellement du mandat de présidente n’est pas abordé. La présidente reste ainsi en fonction malgré l’expiration de son mandat. Le 22 mars 2016 une nouvelle assemblée générale décide « de ne pas renouveler dans ses fonctions la présidente à partir de ce jour ». L’ancienne présidente assigne alors la société en paiement de dommages et intérêts.
L’indemnité statutaire pour révocation fautive
L’ancienne présidente de la SAS estime avoir subi ici une révocation injustifiée et considère par conséquent pouvoir bénéficier de l’indemnisation prévue par les statuts de la SAS. Cependant, qui dit révocation injustifiée, dit une présidente toujours légalement en fonction au jour de ladite révocation. Cette dernière fait prévaloir à l’appui de son pourvoi la tacite reconduction de son mandat social. Le silence de l’assemblée générale à la date du renouvellement du mandat aurait selon ses dires emporté le renouvellement tacite de celui-ci. Ses motifs ne sont pas sans rappeler les dispositions du code civil, notamment l’article 1215 qui énonce que : « lorsqu’à l’expiration du terme d’un contrat conclu à durée déterminé, les contractants continuent d’en exécuter les obligations, il y a tacite reconduction, celle-ci produit les mêmes effets que le renouvellement d’un contrat ». Ces effets étant la conclusion d’un contrat, identique au niveau du contenu, avec pour seule différence la durée cette fois-ci indéterminée du contrat.
A retenir en pratique : même si le président de la SAS n’a pas été révoqué expressément, son mandat cesse au terme prévu. S’il reste en fonction au-delà du terme, les associés peuvent décider de faire cesser ces fonctions à tout moment, que le président ait ou non convenu lors de sa nomination d’une indemnisation en cas de révocation.
Françoise Berton, avocat en droit allemand
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