Directive de l’employeur au salarié de revenir du télétravail

14.10.21  
Directive de retour de homeoffice au bureau
Directive de l’employeur au salarié de revenir du télétravail
Directive de retour de homeoffice au bureau

Le salarié refuse de retourner au travail au quotidien au bureau

Les questions concernant le départ du salarié en télétravail et la prise en charge des coûts liés ont déjà été abordées par les juges allemands à plusieurs reprises. Désormais, c’est la question de savoir ce qui s’applique au cas où le salarié ne veut pas reprendre le travail en présentiel malgré la directive de l’employeur en ce sens qui se pose.

La question de la légalité de la décision de l’employeur concernant la fin du télétravail dépend tout d’abord de l’existence d’accords contractuels. A défaut, c’est l’étendue du pouvoir de direction de l’employeur qui est décisive. Le tribunal supérieur du travail (Landesarbeitsgericht, LAG) de Munich s’est pronconé en deuxième instance par voie de référé dans une décision du 26 août 2021 (n° de dossier : 3 SaGa 13/21).

Le retour au travail en présence est soumis au pouvoir de direction de l’employeur

Le demandeur en justice, graphiste salarié, était depuis décembre 2020 en télétravail. Fin février 2021, l’employeur a ordonné le retour au bureau. Le salarié s’y est opposé.

Pour justifier le retour en présence, l’employeur a fait valoir :

  • que la protection des données n’était pas assurée en raison de l’emploi de l’épouse dans une société concurrente et du travail du demandeur avec leurs logiciels, et
  • que le salarié ne disposait pas de l’équipement technique approprié à son domicile. En effet, lors d’un enregistrement d’un résultat de travail à la maison, une perte de qualité a eu lieu, due notamment aux différents logiciels graphiques.

Tout comme le tribunal en première instance, le LAG a rejeté la demande au motif que ni le contrat de travail ni le § 2 al. 4 du décret sur la protection des travailleurs relatif au Coronavirus (SARS-CoV-2-Arbeitsschutzverordnung, SARS-CoV-2-ArbSchV) ne donnaient droit à un travail à partir du domicile. Le pouvoir de direction doit être exercé à l’appréciation équitable de l’employeur.

Le pouvoir de direction n’est en principe limité que par les principes de la discrétion équitable

Conformément au § 106 1ère phrase de GewO, l’employeur peut définir le travail de manière plus détaillée, y compris concernant le lieu d’exécution du travail, à moins que ces conditions de travail ne soient stipulées dans le contrat de travail, les dispositions d’un accord d’entreprise, une convention collective applicable ou des dispositions légales et que la directive résulte d’une appréciation équitable. Selon la jurisprudence de la Cour fédérale du travail allemande (Bundesarbeitsgericht), le pouvoir de direction comprend également la possibilité de retirer ou de modifier une directive une fois qu’elle a été émise avec effet pour l’avenir. Même le non-exercice du pouvoir de direction sur une longue période ne permet pas de laisser croire au salarié que l’employeur souhaite y renoncer. Ce n’est qu’en cas de circonstances particulières que le salarié peut légitimement croire que son affectation restera la même et que donc, par un comportement implicite, l’employeur s’interdit de donner une autre directive. Par conséquent, selon § 106 GewO, l’employeur a en principe le droit de mettre fin à une activité de télétravail en donnant des instructions.

Selon le LAG, le travail au bureau ne présentait pas à lui seul un risque accru d’infection pouvant entraîner une limitation du pouvoir de direction. Au contraire, les points soulevés par l’employeur devaient être considérés comme des raisons opérationnelles suffisantes pour ne pas faire de télétravail. Le salarié n’aurait pas le droit personnel de faire du télétravail.

Cette interprétation des juges est confirmée par la réglementation du § 2 al. 4 SARS-Cov-2-ArbSchVO (à partir du 21 janvier 2021). Parmi les raisons opérationnelles impérieuses qui y sont évoquées et qui rendent impossible le télétravail, figure également le fait que l’équipement technique disponible est limité.

Dans des cas très exceptionnels, l’employeur est tenu d’accepter le télétravail, notamment si l’employé ne serait pas en mesure de remplir ses fonctions autrement. Dans ces cas, l’obligation de prudence et de prévoyance prévue au § 241 al. 1 du code civil allemand (Bundesgesetzbuch, BGB) pourrait obliger l’employeur à permettre à l’employé de fournir des services en travaillant à domicile. Le pouvoir discrétionnaire de l’employeur était alors réduit « à zéro ». Toutefois, un tel cas exceptionnel n’était pas existant en l’espèce selon le LAG.

Conclusion pour les employeurs

Un employeur peut (même en période de pandémie) ordonner un retour au travail en présentiel s’il existe des raisons opérationnelles suffisantes pour ne pas faire du télétravail et si cela est raisonnable pour l’employé (en termes de santé). Le risque général de s’infecter sur le chemin du travail ou pendant la pause déjeuner ne fait pas échec à l’obligation de se présenter en personne. L’employeur a le droit fondamental de donner des directives à ses employés, notamment concernant le lieu de travail.

Françoise Berton, avocat en droit allemand

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Photo: agcreativlab

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