Obligation de l’employeur allemand de rédiger un contrat de travail écrit
21.10.22Obligation d’écrit issue d’une directive européenne
Le 23 juin 2022, le parlement national de la République fédérale d’Allemagne, le Bundestag, a adopté une loi sur d’importantes modifications de la loi allemande relative à l’information sur les conditions essentielles applicables à une relation de travail, dite « loi sur les preuves » (Nachweisgesetz). Cette loi a pris effet au 1er août 2022.
L’ancienne obligation de l’employeur sur l’information sur les conditions essentielles de la relation de travail
La loi allemande relative à l’information sur les conditions essentielles applicables à une relation de travail prévoyait jusqu’à présent que l’employeur devait établir certains justificatifs relatifs à une relation de travail. Certes, en Allemagne, un contrat de travail peut être valablement conclu à l’oral. Cependant, au plus tard un mois après la date de début de travail convenue, l’employeur était obligé de consigner par écrit les conditions essentielles de la relation de travail, de signer le document et de le transmettre au salarié. Faisaient partie des conditions essentielles du contrat entre autres la désignation des parties contractantes, le date de début et la durée de la relation de travail, le lieu de travail, la composition et le montant de la rémunération, la durée des congés et le délai de préavis.
Dans les faits, la loi s’appliquait cependant très peu. Lorsque l’employeur n’avait pas rempli son obligation d’information, le salarié pouvait exiger un tel document par l’employeur. Lorsque le salarié subissait un dommage financier en raison de l’obligation négligée par l’employeur, il pouvait au cas par cas demander des dommages et intérêts.
Le justificatif écrit du contrat de travail avec des mentions obligatoires depuis le 1er août 2022
La modification de la loi allemande relative à l’information sur les conditions essentielles applicables à une relation de travail au 1er août 2022 étend et complète les obligations d’information déjà existantes. Le justificatif écrit sur l’existence de la relation de travail doit mentionner les points suivants :
- la durée de la période d’essai ;
- la composition et le montant de la rémunération complétée par les heures supplémentaires, les majorations, les primes et les paiement spéciaux ainsi que d’autres éléments de la rémunération qui sont à consigner, ainsi que leur échéance et forme de versement ;
- le temps de travail convenu, y compris les périodes de repos et pauses convenues. Lorsque le travail en équipe est convenu, le système d’équipe, le rythme du travail d’équipe ainsi que les conditions de changement d’équipe doivent être mentionnés ;
- lorsque le travail à la demande est convenu, il convient de consigner par écrit que la prestation de travail est à fournir par le salarié en fonction de la charge de travail. Il s’agit ici de mentionner concrètement le nombre d’heures minimum à rémunérer et le cadre temporel. L’indication détermine les jours et heures de référence prévus pour effectuer la prestation de travail. De plus, le délai dans lequel l’employeur doit informer le salarié au préalable à quel moment il doit effectuer son temps de travail doit être mentionné ;
- la possibilité d’imposer des heures supplémentaires et sous quelles conditions ;
- la possibilité pour le salarié de participer à une formation ;
- le nom et l’adresse de l’organisme de retraite professionnelle dans le cas où cette dernière est octroyée. Sauf si le bénéficiaire de la retraite est tenu de fournir cette information, auquel cas l’employeur n’a pas à d’obligation d’information ;
- la procédure de licenciement à suivre en cas de rupture de la relation de travail. Il s’agit ici des exigences minimales de la procédure : le respect de la forme écrite; l’indication des préavis respectifs aux licenciement ainsi que le délai pour introduire une action en protection contre le licenciement ;
- dans quel(s) pays et pour quelle durée le salarié doit effectuer son travail. Cela est particulièrement pertinent lorsque les activités à l’étranger sont inclues dans l’environnement professionnel du salarié. Dans ce contexte, il convient également de le consigner par écrit si le salarié reçoit des prestations en espèces ou en nature pour son séjour à l’étranger et dans quelle mesure. Il s’agit notamment des éventuelles indemnités de détachement, des frais de voyage, de nourriture et d’hébergement. Il convient également de préciser par écrit si le retour du salarié est prévu et si des conditions doivent être liées à son retour.
La forme préconisée de l’obligation d’information relative au contrat de travail
La forme écrite continue d’être préconisée. La forme écrite signifie selon le droit allemand un document signé à la main par l’employeur. Ainsi, le législateur allemand pose des exigences plus sévères que la directive européenne relative aux conditions de travail transparentes et prévisibles, qui prévoit qu’un envoi par voie électronique (par exemple par courriel) au salarié est suffisant.
Des délais plus courts pour l’obligation d’information
Selon l’ancienne version de la loi allemande relative à l’information sur les conditions essentielles applicables à une relation de travail, un délai d’un mois à partir de la date de début de travail convenue s’appliquait pour remplir l’obligation d’information. La loi actuelle prévoit que certaines mentions sont à consigner par écrit dès le premier jour de travail. Ce sont :
- le nom et les adresses des parties,
- la durée de travail et
- la composition et le montant de la rémunération.
Pour les autres conditions de travail, les délais de l’obligation d’information varient entre sept jours et un mois à partir de la date de début de travail convenue.
En cas de modification ultérieure de la relation de travail, cette modification ne doit plus être notifiée au plus tard au cours d’un mois comme dans l’ancienne version de la loi mais doit parvenir au salarié le jour même de sa validité.
Un autre délai doit être respecté pour toute relation de travail déjà existantes, conclues avant le 1er août 2022 : l’employeur dispose de sept jours (ou au plus un mois) pour fournir le justificatif au salarié, dans la mesure où ce dernier l’exige. Ici, le délai commence après réception de la demande par le salarié.
Violation de la loi allemande relative à la documentation des conditions de travail
Une violation de la loi allemande relative à la documentation des conditions de travail est une infraction. Des sanctions sous forme d’amende peuvent en résulter pour l’employeur. Une violation au sens de la loi allemande relative à l’information sur les conditions essentielles applicables à une relation de travail est un non-respect, un respect non conforme ou une violation contre les formes préconisées. Il en va de même pour un justificatif incomplet ou tardif en tant que violation par l’employeur. En cas de violation, l’employeur est menacé d’une amende pouvant atteindre 2 000 euros.
Une violation des obligations d’information ne conduit néanmoins pas à l’invalidité du contrat de travail. Ainsi, un contrat de travail à l’oral reste toujours valide.
Un justificatif manquant ou incorrect sur le délai d’engagement d’une action en protection contre le licenciement ne change également rien au délai légal de trois semaines. Lorsque le salarié ne réagit pas avant la fin du délai, la fiction de validité du licenciement continue de s’appliquer selon la loi allemande relative à la protection contre les licenciements (Kündigungsschutzgesetz).
Françoise Berton, avocat en droit allemand
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