Reclassement dans l’inaptitude et consultation du CSE

15.02.23  
Le CSE n’est pas consulté pour un salarié déclaré inapte et non reclassé dans l’entreprise
Reclassement dans l’inaptitude et consultation du CSE
Le CSE n’est pas consulté pour un salarié déclaré inapte et non reclassé dans l’entreprise

La Cour de cassation a récemment indiqué qu’il n’y a pas d’obligation de consultation du Comité Social et Economique (en abrégé : CSE) par l’employeur en cas de dispense d’obligation de reclassement contenue dans l’avis d’inaptitude.

Obligation de reclassement en cas d’inaptitude

En principe, si un salarié est déclaré inapte à reprendre son travail initial par le médecin du travail, l’employeur est obligé de procéder à une recherche de reclassement, afin de lui proposer un poste compatible avec son état de santé et correspondant à ses capacités.

Cependant, l’employeur est dispensé de procéder à une recherche de reclassement si l’avis d’inaptitude du médecin indique :

  • Soit que le maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à la santé du salarié ;
  • Soit que l’état de santé du salarié le rend inapte à toute activité professionnelle.

Consultation obligatoire du CSE en cas de recherche de reclassement

En principe, l’employeur doit consulter le CSE en cas d’inaptitude du salarié au sujet des propositions de reclassement (articles L. 1226-2 et L. 1226-10 du Code du travail). L’avis du CSE ne lie pas l’employeur, il s’agit d’un avis consultatif.

Cette obligation s’applique même si l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un reclassement au salarié. Cette consultation s’applique également que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non.

L’employeur doit fournir aux membres du CSE les informations nécessaires sur l’état de santé du salarié et la recherche de reclassement. La consultation doit avoir lieu avant que la proposition de reclassement ne soit présentée au salarié inapte. Bien sûr, si le CSE n’existe pas, il n’y a pas de consultation.

CSE en cas de dispense expresse de reclassement

La Cour de cassation est venue récemment préciser que si le médecin du travail indique dans son avis d’inaptitude que l’employeur est dispensé de recherche un reclassement, la consultation du CSE n’est plus obligatoire.

Il faut que ce soit une dispense expresse de reclassement et que le médecin indique que « tout maintien du salarié en emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi », en cochant l’une de ces deux cases figurant sur l’avis d’inaptitude.

Si le médecin indique seulement que le salarié est inapte à tout poste, a priori, cela ne suffit pas à dispenser l’employeur de consulter le CSE. Dans le doute, il vaut mieux se rapprocher du médecin pour qu’il coche expressément une case.

Pas de consultation du CSE pour inaptitude d’origine professionnelle ou non

Cette solution est retenue par la Cour de cassation qu’il s’agisse d’un cas d’inaptitude d’origine professionnelle (arrêt du 8 juin 2022, chambre sociale de la Cour de cassation, pourvoi n° 20-22.500) ou non professionnelle (arrêt du 16 novembre 2022, chambre sociale de la Cour de cassation, pourvoi n° 21-17.255).

Dans l’arrêt du 8 juin 2022, il s’agissait d’une salariée engagée le 25 avril 1994 en tant qu’opératrice pour la société Finder. Elle avait été victime en 2017 d’un accident du travail puis déclarée inapte à son poste par le médecin du travail dont l’avis mentionnait « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

La salariée a ensuite été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

La Cour d’appel avait condamné l’employeur à verser des dommages-intérêts à la salariée en raison du défaut de consultation des délégués du personnel.

La Cour de cassation a cassé cet arrêt en considérant que « lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter les délégués du personnel ».

Dans l’arrêt du 16 novembre 2022, le salarié concerné avait été engagé le 3 mars 2008 en tant que référent formation par un syndicat. Il a été placé en arrêt maladie en 2017 puis le 4 décembre 2017, le médecin du travail a rendu un avis le déclarant inapte (origine non professionnelle) et précisant « l’état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

La Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel qui avait déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse alors que le médecin avait indiqué dans son avis que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement et qu’ainsi, l’employeur n’avait plus l’obligation de consulter le CSE.

La Cour de cassation confirme son arrêt du 8 juin 2022 et indique « Il s’ensuit que, lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter les délégués du personnel ».

Une précision logique et bienvenue

La Cour de cassation en conclue donc que la dispense expresse de recherche de reclassement est une exception à l’obligation de consultation du CSE. Cette solution est logique et la précision est bienvenue puisque de nombreux employeurs se demandaient si cette obligation de consultation du CSE continuait à s’appliquer ou non en cas de dispense de reclassement.

Cela semblait logique mais il était risqué de ne pas consulter le CSE tant qu’une règle claire n’avait pas été donnée.

Le raisonnement de la Cour de cassation est conforme à l’objet de la consultation du CSE qui est de recueillir l’avis des élus sur les possibilités de reclassement en s’appuyant sur l’avis du médecin. En l’absence d’obligation de reclassement, l’employeur n’est donc plus obligé de consulter le CSE puisqu’il n’a plus à se prononcer sur les possibilités de reclassement.

L’employeur pourra donc dans ce cas licencier le salarié pour inaptitude, sans avoir à consulter le CSE au préalable.

Les questions relatives à la consultation du CSE français sont complexes. Notre Cabinet d’avocats vous conseille et vous défend en droit du travail français.

Françoise Berton, avocat en droit allemand

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Photo: Olivier Le Moal

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