Révocation du gérant allemand : est-il protégé comme un salarié ?

21.12.23  
Révocation du gérant allemand : peut-il invoquer la même protection qu’un salarié ?
Révocation du gérant allemand : est-il protégé comme un salarié ?
Révocation du gérant allemand : peut-il invoquer la même protection qu’un salarié ?

Le gérant d’une GmbH (SARL allemande) n’est généralement pas un salarié, mais un organe de la société. Cela signifie que la protection juridique dont bénéficie un salarié, notamment en cas de révocation de son mandat, ne s’applique pas automatiquement à ce gérant. Il existe toutefois certaines situations dans lesquelles un gérant peut également bénéficier de la protection du droit du travail allemand. L’article suivant examine les circonstances dans lesquelles un gérant de SARL bénéficie de la protection d’un salarié.

Dans un contexte de révocation d’un gérant de GmbH et de négociations entre le gérant et sa GmbH, il est indispensable de se faire conseiller en droit des sociétés allemand par un avocat franco-allemand.

Par principe, le gérant d’une GmbH n’est pas un salarié

Le gérant d’une GmbH (SARL de droit allemand) occupe une position particulière en droit des sociétés allemand : il est en même temps un organe de la société et l’employé de cette dernière. Le statut du gérant d’une GmbH en même temps salarié est une particularité du droit allemand. Ce statut n’existe pas pour le gérant français, qui doit avoir un contrat de travail pour des fonctions distinctes. En raison de ce double rôle d’organe de représentation et d’employé se pose régulièrement la question de savoir si le gérant d’une GmbH peut, comme un salarié, se prévaloir d’une protection contre le licenciement.

En règle générale, lors de sa révocation, le gérant d’une GmbH ne bénéficie pas d’une protection contre le licenciement. Sa relation avec la GmbH n’est en principe pas une relation de travail. Une telle relation de travail n’existe que dans certains cas exceptionnels. Par ailleurs, la protection générale prévue par le droit du travail allemand et issue de la loi allemande sur la protection contre les licenciements abusifs (Kündigungsschutzgesetz) n’est en principe pas applicable. La jurisprudence a cependant, dans différents cas, accordé au gérant une protection générale ou parfois partielle contre le licenciement.

En résumé :
En principe, le gérant n’est pas qualifié de salarié et ne l’est que dans des cas exceptionnels.
La protection légale contre le licenciement des salariésne s’applique généralement pas.

Nomination du gérant de la GmbH et contrat de gérance

C’est au gérant d’une GmbH en tant qu’organe qu’incombe la représentation de la société. Son pouvoir de représentation résulte automatiquement de la nomination par les associés en tant qu’organe conformément à l’art. 35 al. 1 GmbHG. La nomination confère au gérant le pouvoir d’agir pour la GmbH. Ce faisant, le gérant doit respecter les directives des associés.

Il est impératif de distinguer entre la nomination par les associés et la signature d’un contrat de gérance:

  • la décision de nomination du gérant par les associés est l’acte officiel par lequel le gérant détient son pouvoir légal et permet de l’immatriculer au registre du commerce allemand en tant que gérant;
  • le contrat de gérance concerne les relations juridiques personnelles du gérant envers la GmbH. Dans le contrat de gérance, qui est en quelque sorte un contrat de prestations de services, sont réglés des sujets relatifs à la gérance qui ne sont pas déjà dans la décision de nomination par les associés ou les statuts. La conclusion du contrat de gérance entre la GmbH et son gérant n’est pas obligatoire. Le contrat de gérance peut être un contrat de mandat conformément aux §§ 662 et suivants du Code civil allemand. BGB, si l’activité de gestion est exercée à titre gratuit. Cependant, dans la plupart des cas, une rémunération est convenue pour l’activité de gérant, de sorte qu’il s’agit d’un contrat de service sous la forme d’un contrat de gestion selon les §§ 675, 611 BGB.

La qualification de la relation d’emploi en tant que contrat de gérance et donc de prestations de services ne suffit toutefois pas à déterminer s’il s’agit d’une relation de travail au sens du droit du travail allemand. En effet, si un contrat de travail est également un contrat de prestations de service, il implique un lien de subordination vis-à-vis de la GmbH.

En résumé :
Le gérant est nommé en tant qu’organe de représentation.
Les relations juridiques personnelles entre le gérant et la société peuvent être réglées dans le cadre d’un contrat de gérance mais celui-ci n’est pas obligatoire.

Le gérant peut être considéré comme un salarié par le conseil de prud’hommes

Position de la Cour fédérale du travail

La Cour fédérale du travail (Bundesarbeitsgericht, BAG) décide au cas par cas suivant le degré de dépendance personnelle du gérant envers la société. Selon ce critère, le gérant de la GmbH est exceptionnellement considéré comme salarié, si la société détient un pouvoir de donner des directives qui dépasse son droit de direction, l’autorisant alors de donner au gérant des directives sur son travail et sur les processus. La société doit être en position de déterminer les modalités concrètes de la prestation des services de gérance comme le contenu, l’exécution, le temps, la durée et le lieu de l’activité. Le gérant doit alors dans chaque cas agir de façon dépendante et liée par des instructions.

Le BAG n’a cessé de réaffirmer ce point de vue dans sa jurisprudence récente. Par exemple, dans sa décision du 27 avril 2021 (2 AZR 540/20), le BAG indique expressément que la qualité de salarié du gérant ne doit être admise que dans des cas exceptionnels extrêmes. Dans le cas concret, le tribunal devait décider de la validité d’un licenciement avec préavis d’un employé. Il s’agissait de savoir si un salarié bénéficiait ou non de la protection légale contre le licenciement, ce qui dépendait notamment du fait que l’entreprise employait au moins 11 salariés. Le salarié estimait que le licenciement devait obligatoirement reposer sur un motif réel et sérieux car, selon lui, les deux gérants devaient également être pris en compte dans le nombre de salariés, atteignant ainsi le nombre minimum de 11 salariés à partir duquel la protection légale contre le licenciement peut s’appliquer. Le BAG a rejeté ce point de vue en indiquant que « le fait que le gérant d’une GmbH soit soumis à des directives au point requalifier son statut comme celui d’un salarié (…) n’entre en ligne de compte que dans des cas exceptionnels extrêmes » (voir BAG aaO). Selon le BAG (décision du 17.06.2020 7 AZR 398/18), il devrait toutefois en être autrement lorsque les parties ont expressément convenu d’une relation de travail.

Exemple concret avec la décision d’une Cour d’appel 

Dans une décision récente du 5 octobre 2022 (3 Ta 132/22), le tribunal du travail de Düsseldorf a dû se prononcer sur la qualification de salarié du gérant. Il a clarifié les critères pour une requalification exceptionnelle en tant que salarié, qu’il a considéré comme non remplis dans ce cas.

L’affaire était la suivante : Le contrat de gérance d’un gérant unique non associé d’une GmbH contenait la clause suivante : « Le gérant est autorisé à représenter conjointement la société avec un fondé de pouvoir ». La règle générale de représentation était inscrite au registre du commerce : « Si un seul gérant est désigné, il représente seul la société ». Le gérant a résilié son contrat de gérance en respectant le délai de préavis au 30.4.2021. La société a alors à son tour résilié le contrat de gérance sans préavis et l’a informé de sa révocation immédiate de son mandat social, qui a déjà été inscrite au registre du commerce le 30.12.2020. Le gérant a contesté la résiliation sans préavis.

Il a estimé qu’il était un salarié car, en raison de la limitation de son pouvoir de représentation, il ne disposait pas de pouvoirs plus étendus que ceux d’un fondé de pouvoir, ce qui constituait également une violation du principe de liberté de l’organe social. En outre, il devait suivre des instructions, comme un salarié, en ce qui concerne le temps et le lieu de travail ainsi que le régime des congés.

Les juges du LAG ont rappelé que ce qui compte, c’est le degré de dépendance personnelle. Il convient à cet égard de procéder à une évaluation globale. Selon la jurisprudence, un lien de subordination du gérant de la GmbH qui est si fort qu’il permet de conclure à un statut de salarié n’entre en ligne de compte que dans des cas exceptionnels extrêmes.

En l’occurrence, le LAG a confirmé que le contrat de gérance du gérant limitait de manière inadmissible le pouvoir de représentation. Un gérant ne peut pas être contraint d’agir conjointement avec un fondé de pouvoir. Toutefois, aux yeux des juges, cela ne suffit pas pour conclure à l’existence d’une relation de travail. Ce qui compte, c’est l’étendue réelle des instructions dans la pratique contractuelle vécue, qui vont au-delà des directives données par les associés à un gérant, ce qui n’était pas le cas ici.

En résumé:

Le gérant est un salarié lorsque :
1. son travail est soumis à des directives,
2. sous la direction de tiers et
3. il est en situation de dépendance personnelle.

Application possible des dispositions du droit du travail devant le juge civil

Principe de l’application dans les cas exceptionnels

La juridiction civile, au premier rang de laquelle la Cour fédérale de justice (Bundesgerichtshof – BGH), part du principe que le contrat de gérance est un contrat de prestations de services libre. La BGH refuse de considérer le gérant comme un salarié au motif que le gérant exerce lui-même des fonctions d’employeur en raison de sa position d’organe représentant la GmbH et de l’influence qu’il exerce ainsi sur la formation de la volonté de la GmbH.

La BGH autorise néanmoins l’application des dispositions du droit du travail allemand au gérant dans des cas exceptionnels. Il faut pour cela que le gérant soit économiquement dépendant de la GmbH et que la réglementation légale en question n’exclue pas son application aux membres des organes. Dans le cas concret, les fonctions du gérant en tant que représentant légal et chef d’entreprise doivent être secondaires. Ce qui compte à chaque fois, c’est de savoir si la disposition du droit du travail sert principalement à assurer l’existence personnelle et économique du gérant. Il est surtout essentiel de savoir si le gérant met sa force de travail à la disposition de la société à titre principal, comme un salarié. En outre, le fonctionnement de l’activité de l’organe ne doit pas être mis en péril. Cela ne pose pas de problème pour un gérant non associé. Dans le cas d’un gérant associé minoritaire, il peut être décisif de savoir s’il peut empêcher l’adoption de décisions grâce à sa minorité de blocage. En revanche, l’application des dispositions du droit du travail n’entre pas en ligne de compte pour un associé majoritaire qui, en tant que propriétaire du capital, a une influence si importante sur la gestion de la société qu’il dispose également du pouvoir de direction.

En résumé 

L’application des dispositions du droit du travail au gérant suppose que:
1. le gérant est économiquement dépendant.
2) qu’aucune disposition du droit du travail n’exclue expressément les gérants de son application.

Exemple1 : application du droit du travail sur les congés du gérant

Le cas échéant, l’applicabilité des dispositions du droit du travail au gérant peut également résulter d’une interprétation dite « conforme aux directives ». Dans le cadre d’une interprétation conforme aux directives, les tribunaux sont tenus d’interpréter le droit national allemand en se basant autant que possible sur le texte et l’objectif de la directive européenne concernée, afin d’atteindre l’objectif fixé par la directive.
L’importance de l’interprétation conforme à la directive est illustrée par une décision du BAG du 25 juillet 2023 (9 AZR 43/22), dans laquelle il était question de droits à l’indemnité de congé.

Le BAG devait déterminer si la loi fédérale sur les congés (BUrlG) pouvait s’appliquer à une gérante. Selon l’article 1 de la BUrlG, tout travailleur a droit à un congé de repos payé chaque année civile. Si les congés ne peuvent plus être accordés en tout ou partie en raison de la fin de la relation de travail, ils doivent être compensés conformément à l’article 7, paragraphe 4, de la BUrlG. Cela signifie que les congés doivent être payés en argent.

Selon l’article 2 de la BUrlG, la loi fédérale sur les congés s’applique aux ouvriers et aux employés ainsi qu’aux personnes employées pour leur formation professionnelle. Les personnes assimilées à des salariés sont également considérées comme des travailleurs. Il convient de tenir compte du fait que la loi fédérale sur les congés met en œuvre les dispositions de l’article 7 de la directive européenne 2003/88/CE (« directive sur le temps de travail »). Ainsi, lors de l’interprétation de l’article 2 de la BUrlG, il convient de prendre en compte la notion générale de travailleur au sens du droit européen. Selon cette notion de travailleur en droit européen, doit être considérée comme travailleur toute personne qui exerce pour une autre une activité selon les instructions de celle-ci et pour laquelle elle perçoit une rémunération en contrepartie. Selon la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), il est possible qu’un gérant soit un salarié au sens du droit européen, même si le degré de dépendance ou de subordination d’un gérant dans l’exercice de ses fonctions est inférieur à celui d’un travailleur au sens de la définition habituelle du droit allemand. La CJUE se base donc – comme le droit allemand – sur le fait que le gérant soit lié par des instructions, mais elle pose moins d’exigences quant à l’étendue de ce lien de subordination.

Dans l’affaire en question, le BAG a considéré que cette obligation de suivre des instructions existait, étant donné que la gérante devait respecter un horaire de travail de 07h00 à 18h00 sur directives. De plus, la gérante avait des instructions concernant les tâches qu’elle devait accomplir le matin et celles qu’elle devait accomplir l’après-midi. Par conséquent, la gérante était considérée comme un travailleur au sens du droit européen et pouvait faire valoir un droit à l’indemnité de congé.

Exemple2 : application de la loi générale sur l’égalité de traitement (AGG) au gérant

En vertu de l’article 6, paragraphe 3, de l’AGG, celle-ci s’applique expressément aux gérants, dans la mesure où l’accès à l’emploi ou l’avancement professionnel sont concernés.

C’est ce qu’a estimé la Cour fédérale de justice dans sa décision du 23 avril 2012 (II ZR 163/10). Un gérant avait été engagé pour une durée déterminée. A l’expiration de son contrat, il n’a pas été réemployé en tant que directeur. Du point de vue de la Cour fédérale de justice, l’accès à l’emploi au sens de l’article 2, paragraphe 1, point 1, de l’AGG a été affecté par le non-renouvellement de l’engagement. Il n’en résulte toutefois aucune protection contre le licenciement. Les licenciements de gérants ne sont justement pas couverts par cette disposition. En cas de violation de l’AGG par un licenciement discriminatoire, une protection contre le licenciement peut exceptionnellement exister (voir ci-dessous).

Protection de la maternité de la gérante et assimilation à une salariée

Parfois, le législateur prévoit expressément des dispositions de protection pour le gérant afin qu’il soit traité comme un travailleur. Par exemple, en cas de grossesse, les gérantes doivent non seulement être protégées contre le licenciement comme les salariées, mais aussi pouvoir se reposer physiquement comme les salariées. Les interdictions d’emploi prévues par l’article 3 de la MuSchG s’appliquent également aux gérantes non associées de la GmbH et aux gérantes associées minoritaires. Comme celles-ci ne concernent toutefois que le contrat de gérance de la gérante et non son statut d’organe, la nouvelle version de l’article 38 alinéa 3 GmbHG comprend désormais également une protection de la maternité relevant du droit des sociétés, en ce sens qu’elle inclut un droit du gérant/de la gérante à la suspension temporaire de sa nomination, associée à l’assurance d’être reconduit(e) dans ses fonctions à l’issue de la période de protection de la maternité. Si les conditions légales sont remplies, la gérante de la GmbH n’est plus tenue d’accepter un risque de responsabilité menaçant son existence personnelle pendant le congé de maternité prévu par la loi. Elle peut exiger que son statut d’organe social soit également suspendu pendant la période de protection de la maternité en ce qui concerne son contrat de gérance.

Pas de protection générale contre le licenciement pour le gérant

La notion de la protection générale contre le licenciement désigne une protection contre le licenciement dans le sens de la loi allemande sur la protection contre les licenciements abusifs (Kündigungsschutzgesetz, KSchG). Selon cette loi, un salarié peut contester son licenciement devant un tribunal sous certaines conditions. En application de la protection générale contre le licenciement, un licenciement n’est valable que s’il est socialement justifié. Pour cela il faut un motif personnel, ou économique.

Par principe, cette protection ne s’applique cependant pas au gérant d’une GmbH. Il existe notamment deux obstacles légaux : art. 1 al. 1 KSchG et 14 al. 1 n° 1 KSchG.

  • Selon l’article 1 al. 1 KSchG, la loi sur la protection contre les licenciements abusifs concerne la « résiliation de la relation de travail vis-à-vis du salarié ». Selon la jurisprudence de la plus haute juridiction, le gérant d’une GmbH n’est cependant par principe pas un salarié ;
  • L’article 14 al. 1 n° 1 KSchG exclut explicitement du champ de protection des organes de direction de personnes morales, qui sont nommées comme représentants légaux de la société.

Protection générale contre le licenciement pour le gérant d’une GmbH dans de rares cas exceptionnels

A l’aide de différentes situations, qui peuvent se présenter dans le cadre d’une activité de gérant, nous exposerons ci-après l’applicabilité ou l’exclusion de la protection contre le licenciement pour le gérant d’une GmbH.

Accord contractuel individuel de la validité du KSchG dans le contrat de mandat de gérant

L’application de la loi allemande sur la protection contre les licenciements abusifs peut être explicitement convenue dans le contrat de mandat de gérant. Pour cela, il faut cependant respecter les dispositions légales et statutaires concernant le mandat de gérant.

La loi impose par exemple que les contrats de mandat de gérant pour des GmbH participatives selon la loi MitbestG (concerne généralement des entreprises avec plus de 2 000 salariés) soient à durée déterminée et d’au maximum cinq ans. L’application de la loi allemande sur la protection contre les licenciements abusifs n’est pas compatible avec cette règle et une clause faisant référence à cette législation protectrice dans le contrat de mandat de gérant serait alors inopérante.

Si l’application du KSchG est valablement conclue dans le contrat de mandat du gérant, un licenciement inopérant selon le KSchG n’implique pas forcément la continuation de la relation entre le gérant et la GmbH. En cas de litige devant un tribunal avec le gérant concernant la validité du licenciement, la GmbH a généralement la possibilité de demander une résolution du contrat de mandat contre le paiement d’une indemnité. Cela peut résulter de l’interprétation par le juge du contrat de mandat. Le tribunal supposera de façon régulière que les parties au contrat n’avaient pas l’intention de concéder au gérant des protections au-delà de la loi sur la protection contre les licenciements abusifs.

Protection contre le licenciement comme par le biais d’un contrat de mandat de gérant avec un tiers

Dans le cas d’un contrat de mandat de gérant avec un tiers, le contrat de mandat de gérant n’est pas conclu avec la GmbH, mais avec une entreprise tierce.

Exemple 1 : Gérant de la société commanditée de la GmbH & Co. KG

Dans une GmbH & Co. KG il est possible de conclure le contrat de mandat de gérance pour la GmbH commanditée, qui est l’associée de la GmbH & Co. KG, avec la GmbH & Co. KG au lieu de la GmbH commanditée. Pour une telle configuration, la Cour fédérale du travail (Bundesarbeitsgericht, BAG) a décidé que la protection générale contre le licenciement au profit du gérant s’appliquait envers la GmbH & Co. KG, parce que la partie concernée n’était justement pas gérante de la GmbH & Co. KG.

Exemple 1 : Gérant de la filiale et en même temps salarié de la société-mère

Il existe également un contrat de mandat de gérant avec un tiers quand un salarié de la société-mère est nommé gérant d’une filiale. Même si le gérant agit désormais exclusivement pour la filiale, le contrat de travail avec la société-mère voit son exécution suspendue. Même la conclusion d’un contrat de mandat de gérant avec la filiale ne change rien au maintien d’un contrat de travail avec la société-mère. Dans les cas énoncés, le rapport entre les organes existe à chaque fois envers la filiale et non pas envers la société-mère. L’exclusion de la protection générale contre le licenciement selon l’article 14 al. 1 n° 1 KSchG ne s’applique pas vis-à-vis de la société-mère. Le gérant de la filiale qui est en même temps salarié de la société-mère peut alors faire valoir une protection contre le licenciement selon les règles du droit du travail vis-à-vis de la société-mère.

Suspension de l’exécution du contrat de travail : protection contre le licenciement en cas de reprise

La relation de service du gérant d’une GmbH peut être interprétée comme relation de travail, si le futur gérant est d’abord employé comme salarié de la GmbH et ensuite promu aux fonctions de gérant:

  • Lors de la nomination comme gérant, le contrat de travail peut être maintenu sous une forme modifiée sans nécessité de conclure un nouveau contrat de mandat de gérant. Seules les obligations de la GmbH et du salarié, qui occupe désormais également le poste de gérant, seront modifiées dans le contrat de travail existant ;
  • Si en complément du contrat de travail un contrat de mandat de gérant est cependant conclu avec le salarié nommé gérant, il faut distinguer si le contrat de mandat de gérant est conclu à l’écrit ou à l’oral :

Cas n°1 : Un contrat de gérance écrit remplace généralement le contrat de travail. Après la révocation, il peut être à nouveau transformé en contrat de travail.

Cas n°2 : Si le contrat de travail du gérant est conclu verbalement, le contrat de travail initial est maintenu et son exécution temporairement suspendue. Après la révocation, l’ancien gérant doit continuer à être employé sur la base du contrat de travail d’origine.

Protection partielle contre le licenciement du gérant de la GmbH

En cas de dépendance économique et de soumission du gérant à des directives, d’un emploi par un tiers ou d’un contrat de travail suspendu, une protection spéciale contre le licenciement est possible pour le gérant de la GmbH, par exemple :

  • lors de la demande d’un congé parental,
  • lors d’un recours à des temps de soins,
  • en cas de handicap.

L’article 17 MuSchG est un cas particulier selon lequel le licenciement n’est pas autorisé en raison de la grossesse. Sur la base du droit européen il existe dans ce cas la particularité que la gérante est toujours considérée comme salariée protégée par les règles sociales, indépendamment des critères développés par la jurisprudence allemande, à savoir la dépendance économique et l’obligation de se conformer aux instructions.

Dans le cas particulier d’un licenciement discriminatoire, un gérant de GmbH peut également se voir appliquer les règles de droit du travail sur le licenciement. Les licenciements discriminatoires sont interdits par l’AGG. Selon la jurisprudence de la Cour fédérale de justice du 26 mars 2019 (II ZR 244/17), les gérants non associés d’une GmbH peuvent également être protégés par l’AGG contre les licenciements discriminatoires, car selon la Cour fédérale de justice, ils relèvent de la notion de travailleur au sens du droit européen et celle-ci doit être prise en compte dans l’application de l’AGG. Dans sa décision, le tribunal a dû se pencher sur la question de la validité d’une résiliation d’un contrat de gérance en raison de l’atteinte d’une limite d’âge, mesurée à l’aune de l’AGG. La BGH a considéré que le non associé dont le contrat avait été rompu était considéré comme un salarié. Celui-ci peut donc se défendre contre des conditions de licenciement discriminatoires liées à son âge.

Si un gérant souhaite poursuivre sa société en justice en lien avec la résiliation de son contrat de gérance, il doit demander à son avocat de vérifier devant quelle juridiction il peut agir. Si le conseil de prud’hommes allemand est amené à trancher, le gérant doit en outre être en mesure de prouver concrètement et en détail, à l’aide d’exemples, son extrême dépendance avec les directives qu’il reçoit, car cela peut exceptionnellement permettre la requalification comme salarié et soumettre ainsi l’employeur aux règles sur le licenciement de salariés allemands.

Françoise Berton, avocat en droit allemand

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