Les sanctions disciplinaires avant le licenciement

21.02.19  
Les mesures disciplinaires avant le licenciement
Les sanctions disciplinaires avant le licenciement
Les mesures disciplinaires avant le licenciement

Lorsque le comportement du salarié pose problème et que l’employeur veut le faire comprendre au salarié, soit le dialogue est la meilleure solution, soit l’employeur recourt à une sanction disciplinaire. Souvent, on pense au licenciement ou à l’avertissement mais il existe un éventail plus large de sanctions. Bien entendu, ces sanctions ayant un impact sur le salarié, le code du travail encadre le pouvoir disciplinaire de l’employeur.

Le pouvoir disciplinaire de l’employeur est réglementé

Le pouvoir disciplinaire est le droit pour l’employeur, même implanté à l’étranger, de sanctionner tout salarié qui ne respecte pas ses directives, dès lors que ce dernier est soumis au droit français du travail. Il s’agit dans la plupart des cas d’une mesure préalable à un licenciement pour motif disciplinaire en cas de réitération, d’aggravation ou d’apparition d’une nouvelle faute professionnelle.

Le pouvoir disciplinaire de l’employeur est encore plus encadré en France qu’en Allemagne et l’inobservation des règles légales et jurisprudentielles qui régissent la matière peuvent amener à de lourdes conséquences : aussi bien sur la sanction disciplinaire elle-même, que sur le licenciement postérieur éventuellement décidé.

Qu’est-ce qu’une sanction disciplinaire : définition et règles à respecter ?

La qualification d’une « sanction disciplinaire » est donc primordiale en droit du travail français. Ceci explique la définition légale de la notion de sanction, qui constitue selon les termes de l’article L. 1331-1 du Code du travail :

  • « toute mesure, autre que les observations verbales (…) » ;
  • « prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par lui comme fautif (…) » ;
  • « que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération (…) ».

Quand bien même une sanction ne répondrait pas à ces critères, par exemple un avertissement oral ou un simple rappel à l’ordre n’ayant aucune conséquence sur la présence du salarié dans l’entreprise, le droit français oblige l’employeur à respecter une procédure dite « allégée ». Dans ce cas uniquement, l’employeur doit notifier sa décision au salarié soit par lettre remise contre récépissé, soit par lettre recommandée.

Lorsqu’en revanche la sanction a une incidence sur l’un des grands éléments de la relation de travail énumérés plus haut, une lourde procédure disciplinaire doit être respectée : convocation à entretien préalable, tenue de l’entretien par l’employeur ou son représentant et, enfin, notification de la sanction au salarié concerné. Il est d’ailleurs à noter que le règlement intérieur, de même qu’une convention collective, peut prévoir des règles plus spécifiques.

Mesures à respecter pour pouvoir sanctionner disciplinairement

Mais le régime juridique tenant aux mesures disciplinaires ne s’arrête pas là en droit français. En effet, il convient d’énoncer les grands principes impératifs avant la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire :

  • L’obligation de faire figurer les sanctions dans le règlement intérieur de l’entreprise ;
  • La prohibition de certaines sanctions disciplinaires, telles que les sanctions pécuniaires (retenue sur salaire) ou encore les sanctions discriminatoires ;
  • Le respect du délai de prescription des fautes, à savoir le délai de 2 mois entre la connaissance de la faute par l’employeur et l’engagement d’une procédure venant sanctionner cet agissement ;
  • Le respect du délai de prescription des sanctions, qui lui, est égal à 3 ans à compter de l’engagement de la poursuite disciplinaire et au-delà duquel aucune sanction ultérieure ne pourra être prononcée ;
  • La spécificité tenant à la modification du contrat de travail comme sanction disciplinaire.

Sur ce dernier point, dès lors qu’une sanction viendrait modifier un élément essentiel du contrat de travail (rémunération, fonction ou temps de travail), l’accord préalable du salarié devient une condition de l’application de la mesure disciplinaire envisagée. Par exemple, la rétrogradation ou la mutation disciplinaire, en raison du fait qu’elle vient toucher aux fonctions du salarié et aura même un impact éventuel sur sa rémunération, devra recueillir le consentement express du salarié. Sans cet accord, l’employeur devra soit renoncer à cette mesure, soit envisager une autre sanction n’ayant pas d’impact sur les éléments substantiels du contrat de travail.

Liste des mesures disciplinaires au travail

L’employeur est libre de choisir la sanction qui lui paraît la plus adaptée et proportionnelle au comportement du salarié, tout en tenant compte le cas échéant du cadre du règlement intérieur. Par exemple, il peut envisager :

  • un changement de poste ;
  • une rétrogradation ;
  • le refus d’un avancement statutaire ;
  • de prononcer un avertissement ;
  • une mise à pied disciplinaire ;
  • un licenciement, sanction disciplinaire la plus forte et soumise à une procédure spécifique, avec notamment l’envoi d’une lettre de licenciement.

Pas de cumul de la sanction disciplinaire avec le licenciement pour les mêmes faits

Le Code du travail français prévoit expressément qu’une même faute ne peut être sanctionnée deux fois : il s’agit du principe de non-cumul (déclinaison du principe non bis in idem). Par conséquent, une faute ayant déjà fait l’objet d’une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne pourra plus être sanctionnée à nouveau, y compris par un licenciement, sauf à ce que cette même faute persiste dans le temps, se répète ou s’aggrave par de nouveaux griefs.

Le juge sanctionnera l’inobservation de cette règle soit par l’annulation pure et simple de la seconde mesure disciplinaire, soit en constatant l’absence de cause réelle et sérieuse dans le cas d’un licenciement postérieur qui aurait été envisagé.

Une exception réside toutefois dans la « mise à pied conservatoire » qui, du fait qu’elle ne soit pas assimilée à une sanction disciplinaire, permet à tout employeur d’écarter un salarié ayant commis une faute grave ou lourde de son poste et de l’entreprise, pendant la durée de la procédure de convocation à entretien préalable, et jusqu’à la notification de la décision prise.

En résumé, si l’employeur dispose de plusieurs mesures disciplinaires pour faire comprendre au salarié qu’il doit modifier son comportement, il convient de choisir une sanction adaptée qui ne soit pas contre-productive. Il faut également veiller à la forme.

Françoise Berton, avocat en droit allemand

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Photo: Syda productions

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