Santé et sécurité au travail : suivi médical des salariés renforcé
02.08.22De nouvelles règles s’imposent aux employeurs concernant le suivi médical des salariés depuis le 31 mars 2022. La loi n°2021-1018 pour renforcer la prévention en santé au travail est en effet entrée en vigueur depuis le 31 mars 2022 et a été complétée par un décret du 16 mars 2022 (décret n° 2022-372).
Au plan, formel, les visites peuvent désormais être organisées à distance par visioconférence, sous réserve de l’accord du salarié. Par ailleurs, la confidentialité des échanges doit être assurée.
Voici les nouvelles obligations des employeurs sur le fond en matière de santé et sécurité au travail.
Le rendez-vous de liaison avec le médecin du travail
Depuis le 31 mars 2022, est prévue la mise en place d’un rendez-vous dit de « liaison ». L’article L. 1226-1-3 du Code du travail prévoit que « lorsque la durée de l’absence au travail du salarié justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident, constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, est supérieure à une durée fixée par décret (30 jours), la suspension du contrat de travail ne fait pas obstacle à l’organisation d’un rendez-vous de liaison entre le salarié et l’employeur, associant le service de prévention et de santé au travail ».
Ce rendez-vous est facultatif et peut être organisé à l’initiative de l’employeur ou du salarié. Cependant, l’employeur est obligé d’informer le salarié qu’il peut solliciter l’organisation d’un tel rendez-vous. L’information doit être faite de manière individuelle au moment où le salarié est en arrêt. Le salarié reste libre de refuser ou non de se rendre à ce rendez-vous.
Cette nouvelle obligation concerne les arrêts supérieurs à 30 jours, qu’ils soient cumulés ou non, ayant débuté à compter du 31 mars 2022.
L’objectif de ce rendez-vous de liaison est d’informer le salarié sur la possibilité de bénéficier d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle, d’un examen de pré-reprise et de mesures d’aménagement du poste et du temps de travail.
Il s’agit concrètement d’une rencontre entre le salarié absent et l’employeur, auquel est associé le service de prévention et de santé au travail. Cela permet surtout à l’employeur de conserver un lien avec son salarié et de commencer à réfléchir à une reprise du travail dans de bonnes conditions.
La création de ce nouveau rendez-vous permet ainsi de faciliter, aux yeux du législateur, les échanges entre le salarié et l’employeur alors que certains employeurs n’osent pas toujours garder contact avec un salarié en arrêt maladie.
La visite médicale de pré-reprise du travail avec le médecin du travail
Auparavant, la visite de pré-reprise était organisée pour les arrêts de plus de 3 mois. Désormais, elle peut être organisée pour les arrêts de travail (pour maladie professionnelle ou non professionnelle, accident du travail) de plus de 30 jours ayant débuté à compter du 31 mars 2022.
L’employeur est contraint d’informer le salarié de la possibilité de solliciter l’organisation d’une telle visite. L’information peut être fournie au même moment que l’information du salarié de l’existence du rendez-vous de liaison.
La visite de pré-reprise peut être organisée à l’initiative du salarié, du médecin traitant, du médecin du travail ou des services médicaux de l’assurance maladie. C’est le médecin du travail qui procède à la visite. Elle doit avoir lieu avant la reprise du travail.
Au cours de cet examen, le médecin du travail peut recommander des aménagements et adaptations du poste de travail, des préconisations de reclassement, des formations professionnelles à organiser en vue de faciliter le reclassement du travailleur ou sa réorientation professionnelle.
La visite de pré-reprise ne dispense pas de la visite de reprise.
La visite médicale de reprise du salarié en arrêt
La visite de reprise doit être organisée :
- après un arrêt de travail d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail ;
- après un arrêt de travail d’au moins 60 jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnel (30 jours avant le 31 mars 2022) ;
- après un congé de maternité ;
- après une absence pour cause de maladie professionnelle.
Dès que l’employeur a connaissance de la date de la fin de l’arrêt de travail, il doit saisir le service de santé au travail qui organise l’examen de reprise le jour de la reprise effective du travail. L’examen de reprise doit avoir lieu au plus tard dans un délai de huit jours qui suivent la reprise du travail. Les délais étant parfois longs pour organiser un rendez-vous dans les temps, il est conseillé de contacter le service de santé au travail en avance, en tout cas dès que l’employeur a connaissance de la date de fin d’arrêt de travail.
C’est à l’employeur d’organiser cette visite, puisqu’il est soumis à une obligation en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés au travail. La convocation à l’examen de reprise peut se faire par tous moyens.
La visite de reprise a pour objet de vérifier si le poste de travail que doit reprendre le salarié est compatible avec son état de santé, d’examiner les propositions d’aménagement ou d’adaptation de poste, d’émettre le cas échéant un avis d’inaptitude.
Seul le médecin du travail est compétent pour procéder à la visite de reprise, pas le médecin traitant.
La visite médicale de mi-carrière
La visite de mi-carrière est une nouveauté crée par la loi santé au travail et concerne tous les travailleurs.
Cette visite médicale a lieu soit à une date déterminée par un accord de branche ou à défaut, durant l’année du 45ème anniversaire du salarié. Cette visite peut être anticipée et organisée en même temps qu’une autre visite médicale si le salarié doit être examiné par le médecin du travail 2 ans avant l’échéance prévue.
Elle est effectuée par le médecin du travail ou un infirmier en santé au travail exerçant en pratique avancée et est demandée par l’employeur.
Cette visite vise notamment dans l’esprit des législateurs à :
- Faire un bilan de l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé du travailleur, en tenant compte des expositions à des facteurs de risques professionnels auxquelles il a été soumis ;
- Evaluer les risques de désinsertion professionnelle, en prenant en compte l’évolution des capacités du travailleur en fonction de son parcours professionnel, de son âge et de son état de santé ;
- Sensibiliser le travailleur aux enjeux du vieillissement au travail et sur la prévention des risques professionnels (article L. 4624-2-2 du Code du travail).
Suite à cet examen, le médecin du travail peut proposer par écrit, après échange avec le salarié et l’employeur, des mesures d’aménagement et d’adaptation du poste de travail ainsi que des mesures d’aménagement du temps de travail.
La visite post exposition de la santé sur le poste de travail
La visite post exposition prévue à l’article R. 4624-28-2 du Code du travail vient remplacer la visite de fin de carrière qui était réservée aux salariés soumis à un suivi individuel médical renforcé, car affectés à des postes à risques, mais cette visite avait lieu avant le départ à la retraite.
Désormais, la visite post-exposition doit être organisée par le médecin du travail dans les meilleurs délais après la cessation de l’exposition du salarié à des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité ou, à défaut, avant le départ à la retraite. Elle n’est donc pas spécifiquement liée à la fin de la carrière mais à l’exposition aux risques.
L’employeur doit informer le médecin du travail, dès qu’il a connaissance de la cession de l’exposition du travailleur à des risques pour sa santé ou sa sécurité justifiant un suivi individuel renforcé. Il doit également informer sans délai le travailleur concerné de la transmission de cette information.
Si le médecin du travail constate une exposition du salarié à certains risques dangereux, il doit mettre en place une surveillance post-exposition ou post-professionnelle, en lien avec le médecin traitant et le médecin conseil des organismes de sécurité sociale. Cette surveillance doit tenir compte de la nature du risque, de l’état de santé et de l’âge de la personne concernée.
La formation obligatoire des membres du CSE
Les membres du CSE ont également un rôle important pour assister l’employeur dans son obligation de santé et sécurité au travail.
Avant la réforme, les membres du CSE avaient droit à une formation en santé, sécurité et conditions de travail. Aucune durée minimale n’est fixée. Seuls les membres du CSSCT (Commission santé, sécurité et conditions de travail) bénéficiaient d’une durée minimale de formation de 3 jours dans les entreprises de moins de 300 salariés et 5 jours dans les plus grandes entreprises.
Depuis l’adoption de la loi pour renforcer la prévention en santé au travail, tous les élus du CSE quelle que soit la taille de l’entreprise et qu’ils soient membres ou non du CSSCT bénéficient d’une formation d’une durée minimale de 5 jours pour le premier mandat.
En cas de renouvellement du mandat, la durée de la formation passe à au moins 3 jours pour chaque élu, peu important la taille de l’entreprise et 5 jours pour les membres du CSSCT dans les entreprises de plus de 300 salariés.
Quels sont les règles de santé et sécurité au travail ?
Conformément à l’article L. 4121-1 du Code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. L’employeur doit ainsi prévoir des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation ainsi que la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
Parmi ces mesures figurent par exemple la visite médicale de reprise, la visite médicale de pré-reprise ou encore Le rendez-vous de liaison avec le médecin du travail.
Pourquoi la santé et la sécurité au travail ?
Les règles relatives à la santé et la sécurité au travail permettent de protéger les travailleurs et cela contribue à offrir un environnement de travail plus sain, moins stressant et enrichissant pour les salariés. Cela permet aussi aux salariés d’être plus motivés et productifs et de préserver leur santé physique et mentale.
Quel est le but de la santé au travail ?
Le but de la santé au travail est d’évaluer les risques professionnels des salariés sur chaque poste de travail et de s’assurer que la santé du salarié n’est pas mise en danger en raison de son activité professionnelle. Cela permet également de lutter contre le harcèlement au travail et contre la discrimination selon l’état de santé du salarié.
C’est quoi la sécurité au travail ?
La sécurité au travail c’est éviter les accidents du travail et s’assurer que les salariés ne soient pas en danger lorsqu’ils sont sur leur lieu de travail (par exemple lorsque des salariés manipulent des machines ou lorsque des salariés inhalent des produits toxiques). A ce titre, l’employeur est contraint de rédiger un document unique d’évaluation des risques professionnels, qui doit être mis à jour annuellement.
Françoise Berton, avocat en droit allemand
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