Validité du forfait-jour annuel dans les conventions collectives de la banque et des BTP
07.04.15La thématique du temps de travail jour un rôle toujours plus important en droit du travail. Dans un article de l’année 2012, nous avions évoqué des décisions de la Cour de Cassation qui avaient remis en cause des forfaits-jours dans certaines conventions collectives en droit du travail français. Ce sujet est toujours d’actualité en ce début d’année : au fil du temps, la Cour est saisie de procédures au cours desquelles les forfaits-jours sont remis dans d’autres conventions collectives. A la fin de l’année 2014, la Cour de Cassation a rendu deux décisions concernant le forfait-jours.
La validité du forfait annuel en jours dans la convention collective au regard de la protection de la sécurité et de la santé du salarié
Réservée principalement aux cadres bénéficiant d’une grande autonomie, le recours au temps de travail au forfait-jours doit être permis par un accord collectif. Outre son recours, les partenaires sociaux doivent également en assurer la validité en déterminant les garanties à accorder aux salariés. La dérogation à la durée légale du temps de travail doit être faite dans le respect de la protection de la sécurité et de la santé des salariés. La Cour de Cassation veille actuellement de manière stricte au respect de ces principes.
En effet, un salarié dont le temps de travail est régi par une clause de forfait-jours est encore plus qu’un autre exposé aux risques de surmenage et de burn out compte-tenu de la grande amplitude de travail et de la charge corrélative de ses fonctions. Ainsi, des garanties doivent, aux yeux des juges, lui être accordées en termes de santé et de sécurité par l’accord collectif. Cela ne suffit pas : l’employeur doit également veiller à leur effectivité réelle. L’autonomie du salarié ne peut permettre à l’employeur de se décharger de toute responsabilité et contrôle.
La validité du forfait-jours dans la convention collective de la banque confirmée
La convention collective du secteur de la banque prévoit notamment un système auto-déclaratif des journées et des demi-journées travaillées. L’organisation du travail des salariés doit faire l’objet d’un suivi régulier par la hiérarchie qui doit veiller aux éventuelles surcharges de travail. En cas de surcharge de travail, l’employeur doit procéder à une analyse de la situation et prendre les dispositions adaptées. La charge du travail confiée et l’amplitude de la journée d’activité doivent permettre à chaque salarié de prendre obligatoirement le repos quotidien légal.
La Cour de Cassation a validé ces dispositions de la convention collective du secteur bancaire. Le système auto-déclaratif est possible s’il est encadré de garanties. Pour la Cour de Cassation, les dispositions de la convention collective imposent « notamment à l’employeur de veiller à la surcharge de travail et d’y remédier » et répondent donc aux exigences du droit à la santé et au repos.
Les dispositions de la convention collective et de la convention conclue avec le salarié ne sont pas suffisantes en elles-mêmes. Il faut bien entendu que, dans la pratique, ces dispositions soient mises en œuvre par l’employeur.
L’invalidation du forfait-jours dans le secteur du BTP
Contrairement aux dispositions de la convention collective des banques, les dispositions de la convention collective du BTP ont été invalidées par la Cour de Cassation à la fin de l’année 2014. La Cour de Cassation a rappelé dans son arrêt que « toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi des repos, journaliers et hebdomadaires ».
Ainsi, l’accord collectif « qui se borne à prévoir que le contrat de travail doit laisser aux salariés concernés la liberté dans l’organisation d’une partie de leur temps de travail, n’est pas de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au régime du forfait en jours ».
Si, certes un salarié doit bénéficier d’une grande autonomie pour pouvoir relever du forfait jours, des dispositions doit lui garantir le respect des dures maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires.
Dans la pratique quotidienne en droit du travail, il convient de vérifier avant de recourir à une clause de forfait-jours que la convention collective applicable n’est pas invalidée par les juges ou susceptibles de l’être.
Françoise Berton, avocat en droit allemand
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