Fusions transfrontalières de sociétés en Europe

23.06.20  
Fusion et transformation transfrontalières
Fusions transfrontalières de sociétés en Europe
Fusion et transformation transfrontalières

Directive Mobilité du 27 novembre 2019

La directive européenne n°2019/2121 dites « Mobilité » du 27 novembre 2019 est entrée en vigueur le 1er janvier 2020. Cette directive a permis d’harmoniser les règles de transformation, de fusion et de scission transfrontalière de sociétés de capitaux au sein de l’Espace Economique Européen (EEE), comprenant notamment les 28 Etats membres de l’Union Européenne. Elle devra être transposée dans les états membres au plus tard le 31 janvier 2023 (art 3. alinéa 1er de la directive).

Les règles juridiques en matière de transformation, scission et fusion de sociétés capitaux sont désormais enfin harmonisées en grande partie et sont ainsi essentiellement les mêmes au sein des Etats membres de l’Union Européenne. Cette harmonisation concerne cependant uniquement les sociétés de capitaux et non les sociétés de personne. Les dispositions relatives à la liberté d’établissement issues des traités de l’Union Européenne continuent donc de s’appliquer à ces sociétés.

Qu’entend-on par transformation, scission et fusion transfrontalière de sociétés de capitaux ?

La directive Mobilité définit les opérations de transformation, de fusion et de scission transfrontalières de sociétés de capitaux auxquelles s’appliquent les règles qu’elle définit.

Selon celle-ci, la transformation transfrontalière d’une société de capitaux est l’opération par laquelle une société de capitaux, sans être dissoute, liquidée ou mise en liquidation :

  • transforme la forme juridique selon laquelle elle est immatriculée dans un État membre, l’Etat de départ, en une forme juridique de société de capitaux d’un autre État membre, l’Etat de destination et
  • transfère au moins son siège social dans l’Etat de destination.

Tel serait le cas d’une société de capitaux de droit français, par exemple une SA (Société Anonyme) qui se transformerait en une société de capitaux de droit allemand, comme par exemple une GmbH (Gesellschaft mit beschränkter Haftung) ou une AG (Aktiengesellschaft) et que cette ancienne société de capitaux de droit français transférait son siège social dans une ville allemande, par exemple à Cologne.

Quant à la scission transfrontalière, il s’agit d’une opération par laquelle une société de capitaux (la « société scindée ») transfère, au moment de sa dissolution, sans être mise en liquidation, tous ses actifs et passifs ou une partie de ceux-ci à plusieurs sociétés de capitaux nouvellement créées suite à la scission (les « sociétés bénéficiaires »). Les anciens associés, qui sont restées dans la nouvelle société, se voient alors attribuer des titres ou des actions, en principe, par les sociétés bénéficiaires. La scission transfrontalière concerne des sociétés de capitaux ayant leur siège social, leur administration centrale ou leur principal établissement dans un état membre de l’EEE. Les législations d’États membres différents doivent s’appliquer à ces sociétés. Tel serait notamment le cas d’une SA de droit français qui transférerait au moment de sa dissolution une partie de ses actifs et passifs à plusieurs GmbH de droit allemand créées suite à la scission.

La directive exclut les scissions visant à augmenter le patrimoine d’autres sociétés préexistantes à la scission.

Enfin, la fusion transfrontalière est l’opération par laquelle une ou plusieurs sociétés (les sociétés absorbées) transfère(nt), par la suite ou au moment de leur dissolution sans liquidation, l’ensemble de leur patrimoine, actif et passif, à une autre société préexistante (la société absorbante).

Les fusions transfrontalières faisaient, contrairement aux autres opérations transfrontalières, déjà l’objet d’une autre directive européenne (la directive 2005/56/CE du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux). La directive du 27 novembre 2019 a étendu leur champ d’application.

La directive européenne de 2005 considérait uniquement les fusions lors desquelles il était procédé à l’émission de nouveaux titres sociaux par la société absorbante accordés aux actionnaires. Depuis l’entrée en vigueur de la directive Mobilité, le droit européen considère également la fusion lors de laquelle il n’est pas procédé à un tel échange. Dans le cadre de ce type de fusion, des conditions supplémentaires doivent être remplies.

Quelles sont les règles communes applicables aux opérations de transformation, scission et fusion transfrontalière de société de capitaux ?

Les règles communes aux opérations de transformation, de scission et de fusion transfrontalière de société de capitaux introduites par la directive Mobilité instaurent, tout d’abord, un contrôle anti-fraude et anti-abus dans l’Etat de départ et dans l’Etat de destination. La légalité de l’opération est ainsi contrôlée au sein de ces deux Etats selon les législations de ces Etats.

Ensuite, la directive Mobilité régit les droits des parties prenantes, c’est-à-dire des associés, des créanciers et des travailleurs. Le projet de l’opération transfrontalière doit leur être remis et un certain nombre d’informations doivent leur être communiquées.

Certaines règles permettent de protéger les actionnaires minoritaires en prévoyant un droit de sortie de la société pour ceux opposés à l’opération.

Au sens de la directive Mobilité, les créanciers sont ceux dont la créance est née antérieurement à la publication du projet de l’opération transfrontalière et non encore échue au moment de cette publication. La société doit informer les créanciers des garanties qui leurs sont offertes (telles que les cautionnements et les gages). La directive leur accorde également le droit d’émettre des observations sur le projet de l’opération transfrontalière.

Les travailleurs disposent d’un droit à l’information et de consultation concernant le projet de l’opération transfrontalière mais aussi de participation à l’opération juridique. Les organisations représentatives des travailleurs tel que le Comité Social Economique (CSE) assurent le respect de ces droits.

Françoise Berton, avocat en droit allemand

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Photo : bas121

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