Les entreprises peuvent se baser sur les prises de positions du fisc
10.10.18Renforcement de la sécurité juridique des entreprises lors d’un contrôle fiscal avec la loi du 10 août 2018
La loi du 10 août 2018 « pour un Etat au service d’une société de confiance » a introduit de nouvelles dispositions visant à renforcer les garanties contre les changements de doctrine de l’Administration au bénéfice des entreprises.
Ces nouvelles garanties sont octroyées à trois niveaux différents :
- Au cours d’une vérification de comptabilité, les contribuables ont la possibilité de solliciter une prise de position formelle de l’Administration. Cette possibilité était déjà ouverte par la doctrine administrative. Elle est à présent prévue dans la loi (article 9) ;
- En droit fiscal, l’article 11 de la loi prévoit en outre, que lorsque l’Administration ne propose pas de rectification à l’issue d’un contrôle fiscal sur certains points, ces points sont opposables à l’Administration ;
- Enfin, l’article 17 de la loi introduit un régime selon lequel l’Administration peut examiner, sur demande des entreprises, la conformité de leurs opérations à la législation fiscale. L’Administration prend dans ce cadre position sur l’application de la législation fiscale.
Prise de position de l’Administration fiscale au moment du contrôle de comptabilité
L’entreprise doit formuler une demande écrite qui respecte les dispositions du livre des procédures fiscales tant dans sa forme que dans son contenu. Il est nécessaire de respecter un certain calendrier. Cette demande doit être faite avant que la proposition de rectification ne soit envoyée, ou bien, en matière de contributions indirectes, avant la notification de l’information orale ou de la proposition écrite de taxation.
Le vérificateur doit prendre expressément position, c’est-à-dire qu’il va lister lors de l’établissement du document sur les résultats du contrôle les points contrôlés qui ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’une rectification.
Lorsque les conditions légales sont respectées, la prise de position explicite sur l’un ou sur la totalité de ses points engage l’Administration vis-à-vis du contribuable.
Ce dispositif connaît cependant logiquement certaines limites. Cette prise de position n’a plus vocation à protéger le contribuable dans les circonstances suivantes : un changement de législation, de doctrine administrative ou encore une modification de la situation du contribuable. L’Administration peut également changer d’avis, mais cela ne vaudra que pour l’avenir.
Cette garantie s’applique aux contrôles dont les avis sont adressés à compter du 11 août 2018 ainsi qu’aux enquêtes effectuées par l’Administration à compter de cette date.
Opposabilité des points ne faisant pas l’objet de rectification
Dorénavant, tous les points examinés lors d’un contrôle fiscal, lorsqu’ils n’ont pas fait l’objet d’une rectification sont considérés comme tacitement validés par l’Administration fiscale. C’est-à-dire que le contribuable peut s’en prévaloir lors d’un contrôle ultérieur. L’Administration est engagée sur les points qui n’ont pas fait l’objet de rectification mais qui sont néanmoins mentionnés comme ne nécessitant pas de rectification.
Cette garantie est applicable aux contrôles dont les avis sont adressés à compter du 1er janvier 2019.
Possibilité de demander librement à l’Administration de prendre position sur une opération
On connait à ce jour le rescrit fiscal. Ici, le législateur entend aller encore plus loin. En effet, la prise de position de l’Administration qui la lie intervient dans de plus nombreuses situations, car si elle peut être une réponse à une demande de rescrit, elle peut aussi prendre la forme d’une décision individuelle de l’Administration dans une procédure de contrôle ou une procédure contentieuse. Pour l’heure, on sait que cette procédure pourra être mise en œuvre à la demande de l’entreprise. L’Administration vérifiera ainsi la conformité des opérations à la loi fiscale et prendra formellement position. Le contribuable pourra donc s’en prévaloir ultérieurement.
Ce dispositif ne bénéficiera pas forcément à toutes les entreprises et pour tous types d’opérations fiscales. Cette possibilité nouvelle doit faire l’objet d’une ratification par ordonnance dans les neuf mois de la promulgation de la loi. La procédure sera donc précisée ultérieurement.
Françoise Berton, avocat en droit allemand
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