Action en justice d’associés et préjudice de la société

09.03.22  
L'action sociale en justice de l'associé pour sa société
Action en justice d’associés et préjudice de la société
L'action sociale en justice de l'associé pour sa société

L’action sociale de l’associé pour la société

Seule l’action sociale (aussi appelée action ut singuli) est ouverte à l’actionnaire qui veut agir en réparation du préjudice de la société lorsque les représentant légaux de la société restent inactifs. C’est ce que nous rappelle la cour d’appel de Paris à l’occasion d’une décision rendue la 9 novembre 2021 (n°19/23007).

Une société anonyme ayant une activité de holding et dépourvue de salarié a conclu plusieurs conventions réglementées avec sa société mère et une société sœur. Les conventions conclues avec la société mère portaient sur des prestations informatiques alors que celles conclues avec la société sœur portaient sur des prestations d’assistance administrative et comportaient le paiement d’un loyer.

En 2014, un nouvel actionnaire a fait son entrée dans le capital de la holding. Ayant douté de ce que les conventions conclues avec la société mère et la société sœur l’avaient été à des conditions normales de marché, ce nouvel actionnaire a saisi le président du tribunal de commerce de Paris statuant en référé afin que soit désigné un expert chargé d’apprécier si les conventions ont effectivement été conclues à des conditions de marché.

Avant même que l’expert ait rendu son rapport, le nouvel actionnaire a assigné devant le tribunal de commerce tous les dirigeants communs de la société mère et de la société sœur en réparation du préjudice subi par la société anonyme en lien avec la conclusion des conventions.

Le nouvel actionnaire considérait que les conventions conclues entre la holding et la société mère d’une part et la société sœur d’autre part étaient préjudiciables à la société. Selon lui, les dirigeants communs à la société mère et à la société sœur devaient en supporter le coût.

Sa demande a été rejetée par le tribunal de commerce de Paris, puis par la cour d’appel de Paris.

Base légale du droit à agir de l’associé dans l’assignation

L’actionnaire a fondé son action en justice contre les dirigeants des sociétés cocontractantes sur le fondement des articles rendant obligatoire l’approbation par les actionnaires de certaines conventions conclues entre sociétés d’un même groupe préalablement à leur signature. Ces conventions sont aussi appelées conventions réglementées.

Il n’a cependant pas justifié de son action en justice en tant qu’action par un associé au nom de la société visant à réparer le préjudice subi par la société anonyme. Or, rappelons que, normalement, ce sont les représentants légaux qui agissent en justice pour une société, car ils ont un pouvoir légal de représentation.

Fondement de l’action en justice par l’associé de la société

La seule action en justice qu’un actionnaire peut engager au nom et pour le compte de la société est l’action dite ut singulifondée sur l’article L. 225-252 du Code de commerce. Il ne peut pas agir sans indiquer cette précision fondamentale.

Il s’agit en fait d’une action en responsabilité civile visant à réparer les préjudices que la société aurait subi du fait des administrateurs ou directeurs généraux de la société.

Les juges ont rappelé que l’associé ou actionnaire souhaitant engager une action devant les juges devaient clairement viser ce fondement légal pour leur action, à défaut de quoi l’action était irrecevable.

Délai de prescription de l’action sociale ou action ut singuli

L’action ut singuli se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou s’il a été dissimulé de sa révélation. Ce n’est donc pas le dommage qui importe mais bien sa source.

Dans le cas soumis aux juges à propos des conventions réglementées contestées, le fait dommageable était la convention préjudiciable à la société. Le point de départ de l’action était donc la date de conclusion de la convention et non pas celle du paiement des factures. Ces conventions étaient toutes en l’espèce à durée déterminée et pour certaines renouvelables. Chaque date de renouvellement de la convention faisait courir un nouveau délai de prescription.

La cour d’appel a également précisé que la saisine en référé du président du tribunal de commerce de Paris aux fins de voir désigner un expert n’avait aucun effet interruptif. La prescription de l’action ut singuli continuait donc de courir.

La dernière des conventions ayant été renouvelée en 2013, l’action ut singuli était prescrite lorsque l’actionnaire a voulu agir en 2017.

A retenir en pratique : Pour agir en réparation du préjudice subi par la société, les actionnaires disposent d’une seule action, l’action ut singuli. Pour bien défendre l’intérêt social, ils doivent veiller à agir rapidement, car le délai est bref : 3 ans à compter de la conclusion du contrat aux conséquences préjudiciables.

Françoise Berton, avocat en droit allemand

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Photo: Corgarashu

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